christianVendredi 4 mars à 16h30

Un voyage en Mongolie occasionna pour moi une découverte impromptue. Alors que je me déplaçais pour une mission humanitaire (en Chine c'est une responsabilité des peintres), j'eus l'occasion d’observer un rituel chamanique sur une montagne sacrée, dédiée à Wu Zi, grande figure chamane...

Cela confirma mon intuition d'un lien entre l'acte de peindre et le chamanisme : même souci de se confronter à l'aléa, de laisser surgir l'insu. Mais ce qui me frappa fut le caractère « moébien » du rituel chamanique : le désordre de la transe est le résultat d’un dispositif extrêmement réglé, rythmé, cadencé. Plus du même produit de l'autre. Ceci ajoute à l'étrangeté du chamanisme, à la complexité de cette pratique qui est à la fois :

1. une série de conceptions ayant trait au psychisme et au monde , à la relation hommes-esprits ;

2. un procédé d'investigation et de déclenchement des processus psychiques, qui autrement sont à peine accessibles ;

3. une méthode de traitement (exorcisme ou endorcisme) ; la guérison étant de surcroît.

Toute ressemblance avec la psychanalyse n'est pas purement fortuite. Avec l'activité picturale non plus. En particulier avec la tradition chinoise de la peinture sans pinceau (peinture au doigt, encre jetée, tampon, pochoir,...), rite auquel je m'applique. Peinture sans pinceau pour évoquer, sans émotion, ce qui n'a pas de forme.

La référence au chamanisme n'est en rien exotique pour la tradition chinoise. Celle-ci en effet y est profondément enracinée : les pratiques des chamanes y ont été religion d'état, le chamanisme jaune, encore vivant en Asie. En Europe non plus, même si on l'oublie ou le cache, comme le font les idéologues, intégristes chrétiens ou sionistes, qui n'acceptent pas d'autres sources que la Bible. Le VIème siècle avant notre ère en effet vit l'arrivée de chamanes sibériens à Athènes. Ils furent désignés sous le terme d'Hyperboréens. Ils diffusèrent leurs savoirs et pratiques. Pythagore par exemple se pensait être la réincarnation d'un chamane célèbre, tandis que Platon conversait avec Abaris, autre chamane.

Plus radicalement encore le chamanisme relie aux origines des cultures humaines. Les chamanes sont les bibliothécaires des savoirs acquis au fil des millénaires durant les glaciations paléolithiques. Leur culture est celle des chasseurs premiers et leur rôle est ancestral et multiple : Interpréter les rêves, penser l'avenir, retrouver un mort, résoudre une crise climatique, donner un nom... La pratique picturale a réduit ses domaines d'intervention mais conserve la mission principale : le peintre comme le chaman donne un sens aux événements, permet une préhension du monde, rend possible une représentation. Je parle bien sûr de peinture et non des spectacles et jeux de cour des maîtres financiers façon Jeff Koons, qui tiennent lieu d'art aux yeux des coteries au pouvoir. Dominique CHRISTIAN

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